1. Louis Janmot (1814-1892) Génération divine

Génération divine, naissance de l'âme

Louis Janmot (1814-1892) Poèmes de l'âme (1835-1880)

Peintre de l'école lyonnaise, Louis Janmot est un artiste complexe représentatif d'un XIXème foisonnant : entre le romantisme teinté de christianisme, le symbolisme et le préraphaélisme d'origine anglais ( idéal pictural inspiré des primitifs italiens du Quattrocento florentin surtout).

Les poèmes de l'âme, associant une série de dix-huit peintures lié à des poèmes, sont le récit de la vie spirituel de l'artiste; il semblerait que le jeune homme en robe marron soit une projection du peintre lui-même qui chemine accompagné d'une belle jeune fille en blanc personnifiant sa partie féminine, son âme.

Les cinq premiers tableaux retracent la naissance de l'âme parmi la cour céleste et l'enfance qui s'achève au souvenir du ciel.

Le toit paternel, le mauvais sentier, le cauchemar et le grain de blé sont le passage à une réalité angoissante et le grain de blé ouvert la porte à l'initiation à la vie chrétienne composée de première communion, virginitas, l'échelle d'or.

Ensuite du treizième tableaux au dix-septième, les deux personnages sont entraînés dans un mouvement ascendant ( rayons de soleil, sur la montagne, un soir, le vol de l'âme, l'idéal ).

L'ultime tableau réalité symbolise l’évanescence de l'idéal; le laisse seul, plantant une croix, il est comme endeuillé, le visage caché par l'ombre, mais entouré par un paysage splendide.

Un ensemble de quinze dessins au fusain axé sur la confrontation entre le sublime et le Mal complète cette série où le protagoniste est entré dans la maturité. (solitude, rêve de feu, les Générations du Mal...la Délivrance, sursum corda).

I-V Naissance et enfance de l'âme

Louis Janmot (1814-1892) Génération Divine, musée des beaux-arts de Lyon

I GENERATION DIVINE

A l'instant qu'a choisi la sagesse infinie

Le néant vaincu cède et fait place à la vie :

De l'abime entr'ouvert, sombre et silencieux,

Une âme humaine monte à la clarté des cieux ;

Et le Dieu créateur, d'une ineffable ivresse,

A tressailli lui-même, et sur son cœur il presse

Comme un père l'enfant que son souffle a formé,

Et qui s'est senti vivre en se sentant aimé.

Salut, nouveau venu, qu'élève au rang de l'être

Le triple don d'aimer, de vouloir, de connaître!

Que votre voix se joigne aux célestes concerts ;

Elle manquait pour Dieu dans l'immense univers !

Contemplez, abrité sous l'ombre de ses ailes,

Du Bien, du Beau, du Vrai les sources éternelles ;

Car l'Idéal, pour vous un moment dévoilé,

Bientôt va s'obscurcir ; il faut, pauvre exilé,

Il faut, quittant le ciel, que votre ange vous mène

Par ce chemin où doit passer toute âme humaine ;

Libre de mériter, à l'heure du retour,

Un arrêt sans appel de colère ou d'amour.

Quels destins vous fera l'épreuve de la terre?

Nul n'en sait rien, sinon que l'épreuve est austère,

Que le bonheur pour l'homme est un fruit défendu,

S'il ne veut pas pleurer le ciel deux fois perdu.