Marie Laurencin, Apollinaire et ses amis, ou Le Rendez-vous des "amis"
Marie Laurencin ( 1883-1956 ), Apollinaire et ses amis, ou Le Rendez-vous des "amis", 1909, huile sur toile, Paris, musée national d'Art moderne
de gauche à droite : Gertrude Stein, Fernande Olivier, une muse, la chienne Fricka, Guillaume Apollinaire, Pablo Picasso, Marguerite Gillot, Maurice Cremnitz et Marie Laurencin
poèmes dédiés à Marie Laurencin, d'Apollinaire dans calligramme ( rédigés entre 1913-1916 )
La grâce exilée
Va-t’en va-t’en mon arc-en-ciel
Allez-vous-en couleurs charmantes
Cet exil t’est essentiel
Infante aux écharpes changeantes
Et l’arc-en-ciel est exilé
Puisqu’on exile qui l’irise
Mais un drapeau s’est envolé
Prendre ta place au vent de bise
La boucle retrouvée
Il retrouve dans sa mémoire
La boucle de cheveux châtains
T’en souvient-il à n’y point croire
De nos deux étranges destins
Du boulevard de la Chapelle
Du joli Montmartre et d’Auteuil
Je me souviens murmure-t-elle
Du jour où j’ai franchi ton seuil
Il y tomba comme un automne
La boucle de mon souvenir
Et notre destin qui t’étonne
Se joint au jour qui va finir.
Refus de la colombe
Mensonge de l’Annonciade
La Noël fut la Passion
Et qu’elle était charmante et sade
Cette renonciation
Si la colombe poignardée
Saigne encore de ses refus
J’en plume les ailes l’idée
Et le poème que tu fus
Les feux du bivouac
Les feux mouvants du bivouac
Éclairent des formes de rêve
Et le songe dans l’entrelac
Des branches lentement s’élève
Voici les dédains du regret
Tout écorché comme une fraise
Le souvenir et le secret
Dont il ne reste que la braise
Les grenadines repentantes
En est-il donc deux dans Grenade
Qui pleurent sur ton seul péché
Ici l’on jette la grenade
Qui se change en un œuf coché
Puisqu’il en naît des coqs Infante
Entends-les chanter leurs dédains
Et que la grenade est touchante
Dans nos effroyables jardins