Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

peinture : une quête du vif. Quand je me rends compte de mes erreurs, j'aurais aimé me tromper sur le coup dans mes certitudes de sorte que ce que je pense être faux soit en réalité juste.

08 May

James Ensor, La Mort et les masques, 1897,

Publié par Becker Marie-Jeanne  - Catégories :  #James Ensor, #expressionnisme symbolisme mort

James Ensor, La Mort et les masques, 1897,

" Le masque me dit : fraîcheur de ton, décor somptueux, grands gestes inattendus, expression suraiguë, exquise turbulence." J.Ensor, Mes Ecrits

La Mort et les masques, 1897, huile sur toile, 78,5x 100 cm. Liège, musée d'Art contemporain de la Ville.

Le personnage au milieu, de face, imposant, est un squelette portant un manteau bleu clair et la crâne a la mâchoire expressivement ouverte. Il figure la Mort et tient dans sa main une bougie dont la flamme rouge-jaune-bleu est un symbole de la vie se consumant inexorablement mais aussi de la matière salvatrice de la peinture : la couleur. Autour du "portrait" de la Mort, sept autre personnages masqués à l'allure grotesque, intimidante sont représentés comme sortant tout droit d'une mascarade. Ensor joue énormément sur le thème du déguisement, jusqu'aux évocations les plus funestes et par ce procédé il fait ressortir l'hypocrisie, la dissimulation de toute cette société moderne décrit par l'artiste avec une touche épaisse en grands traits.

Ce n'est pas la première fois qu'Ensor utilise cette technique de portraitisation des masques de son atelier; en 1889, il peint Bouquet d'artifice ( huile sur toile, 54 x 47,5 cm, Gand ), le doute persiste à savoir si au centre, il s'agit du visage d'une vieille femme maquillée ( ou même un homme? ) ou d'un masque, en tout cas les figures de différentes échelles le bordant semblent ridiculisés une idée dépassée de la beauté dépérissent, malgré ces fleurs en guise de chapeau.

L'intrigue ( 1890, huile sur toile 90 x 150 cm Anvers. ) comporte douze figures déguisées, cependant si l'on regarde avec attention dans le fond, à gauche on peut apercevoir les contours d'un visage ( possède des cornes? ). Là, l'artiste a certainement eu a dessein, la satire d'une société dominée par la bourgeoisie, le couple au centre au costume assez élégant (chapeau haut-forme, cygne mort en guise de fourrure, grand manteau ) mais dont le secret monstrueux paraît éloquent. On remarque un autre détail, la présence d'une petite marionnette inerte de théâtre japonais, cela marque l'intérêt d'Ensor pour l'art de l'extrême orient, monde éloigné, inconnu . Déjà dans l'intrigue la touche se fait par une touche de couleur vibrante, cependant c'est son œuvre La Mort et les masques qui marque l’avènement d'une expressivité lumineuse grâce à ses couleurs pures mélangées à du blanc.

Les réalisations d'Ensor sont marquées par une forte continuité, il n'hésite pas à faire des renvois à d'autres de ces travaux, cela crée une correspondance habile et riche en sens. On peut ici reconnaître dans le fond la faucheuse de l'eau-forte de 1896, La Mort poursuivant le troupeau des humains, dont le titre est suffisant pour se faire une image. D'ailleurs on remarque au-dessus dans le ciel irréel, nuageux, deux squelettes faucheurs et un personnage poursuivit par l'une d'entre elles, dans une montgolfière en train de déféquer...Le point d'humour ne manque pas : la dérision, l'humour noir, l'ironie souvent associés à la peinture sont également des éléments prépondérants chez l'artiste ostendais.

Ce tableau la mort et les masques, jugé par le troisième Reich parmi les œuvres d'art dégénérées et fut saisit en 1937, gardé à la galerie Fische, pour être vendu à Lucerne en 1939.

Le poème Pierrot de Paul Verlaine, toujours dans le répertoire de carnaval aurait inspiré Ensor pour réaliser ces figures grotesques.

Paul Verlaine (1844-1896 )

Pierrot

Ce n'est plus le rêveur lunaire du vieil air
Qui riait aux aïeux dans les dessus de porte ;
Sa gaîté, comme sa chandelle, hélas! est morte,
Et son spectre aujourd'hui nous hante, mince et clair.

Et voici que parmi l'effroi d'un long éclair
Sa pâle blouse a l'air, au vent froid qui l'emporte,
D'un linceul, et sa bouche est béante, de sorte
Qu'il semble hurler sous les morsures du ver.

Avec le bruit d'un vol d'oiseaux de nuit qui passe,
Ses manches blanches font vaguement par l'espace
Des signes fous auxquels personne ne répond.

Ses yeux sont deux grands trous où rampe du phosphore
Et la farine rend plus effroyable
encore
Sa face exsangue au nez pointu de moribond.

La peinture Masques raillant la mort de 1888 ( 81,3 x 100,3 cm ) est un tableau au dimension a peu près égale à celui de 1897 La mort et les masques, mais l'effet est totalement opposé.

Pour finir, je dirait qu'Il convient à chacun de découvrir par soi-même la vérité cachée de ces masques et de prendre part au spectacle...

Laurence Madeline, et al. 2009, James (art) Ensor, Catalogue d'exposition (New York, MoMa, 28 juin - 21 septembre 2009 / Paris, musée d'Orsay, 20 octobre 2009 - 4 février 2010 ) Réunion des musées Nationaux, Paris 288 p.

Commenter cet article

À propos

peinture : une quête du vif. Quand je me rends compte de mes erreurs, j'aurais aimé me tromper sur le coup dans mes certitudes de sorte que ce que je pense être faux soit en réalité juste.